dimanche 22 décembre 2013

Les autres - Alice Ferney





 Comment transformer une fête d'anniversaire en psychodrame familial ? Vous le saurez en lisant "Les Autres" !

Le résumé
Prenez une famille : la grand-mère, Nina, matriarche centenaire , la mère, Moussia, épouse délaissée, les fils, Niels, l'aîné mal aimé, et Théo, le cadet bien aimé. Ajoutez un père absent, une guirlande de jeunes femmes, Marina, mère d'un petit garçon, Estelle, fiancée lumineuse de Théo, Fleur, aimable fiancée de Claude, un ami de Théo. Voilà pour la présentation. Faites-les jouer à un jeu de questions réponses. Secouez bien.  Vous obtenez les pensées intimes de chacun, l'enregistrement d'une soirée familiale comme un film pris sur le vif et le commentaire de la soirée assuré par un psychologue averti, l'auteur. Monologues, dialogues et commentaires, trois versions d'une même histoire.

L'intérêt du livre
Il réside dans cette triple écriture. Les deux premières parties, monologues et dialogues, constituent presque une pièce de théâtre. Présentation des personnages par eux-mêmes, comme un prologue, et c'est la pièce, la soirée :  les échanges entre les participants. La troisième partie apporte les éclaircissements de l'auteur aux questions que l'on s'est ou non posé.


Peut-être trouverez-vous les monologues un peu confus, les dialogues un peu longs. Il n'y a pas d'intrigue qui progresse. Juste l'enchaînement des questions réponses du jeu et les réactions des personnages.

Penserez-vous aussi que  l'auteur charge un peu la barque ? Les principaux personnages cachent de graves blessures intimes. La mère criera sa peine de femme flouée, Marina révèlera son étouffant secret et Fleur le sien. Nina, la grand-mère quittera la scène discrètement,  Les hommes ont aussi leur malheur : le père, Luc, fuit son foyer. Peut-être n' y a-t-il jamais eu sa place. Sa belle-mère, Nina, a toujours vécu dans la maison familiale; sa femme l'a jugé incapable de s'occuper de ses fils. Niels, le fils aîné, fusillé enfant par un regard de sa mère, se conduit comme un enfant insatiable. Est-ce que les jeunes couples surmontent mieux leurs difficultés ? Estelle, sensible à toute une poésie de la vie, de la maison, d'un destin de femme, d'épouse et de mère, Théo, enfant aimé, fiancé heureux, semblent porter les espérances d'A. Ferney. Mais Fleur, barricadée derrière son joli sourire, et Claude, son fiancé,enfermé dans ses mensonges, paraissent moins bien lotis.

Et puis encore toutes ces questions :  les mots ont-ils un pouvoir thérapeutique ou toxique ?  Est-ce que le silence est salutaire ou bien est-il néfaste ?  Est-ce que parfois on peut communiquer avec un sourire, un regard,  une caresse, un geste et parfois non ? Alice Ferney met aussi en valeur les instants fugaces où la communication non verbale passe... ou ne passe pas :  Nina entoure Niels de ses bras, Missia pleure allongée auprès de son mari.

De l'art de la communication, c'est bien le sujet et l'intérêt de ce roman.
Merci à Danièle de m'en avoir parlé !


L'auteur
Alice Ferney est docteur en Sciences Economiques et professeur d'université. Mais toute petite, elle a voulu écrire. On est surpris par la place que prend "la cause des femmes" dans son oeuvre, mais ces femmes n'ont pas de métier. C'est comme s'il manquait une dimension dans leur portrait.

 J'ai lu Grâce et Dénuement autour de la question des Roms et L'élégance des Veuves, sur le rôle de la femme dans les milieux aisés du début du siècle dernier (on a tout de même progressé depuis !). Je vais me mettre à La Conversation Amoureuse.

Citations

"Nina, toujours dans la bienveillance, dans l'éblouissement de la vie, solaire et envahisante ! "

"Moussia regardait son époux, allongée à côté de lui sans oser le toucher, se sentant une gisante dans le lit conjugal, une vestale intouchée et veillie, et ressentant le trajet de chaque larme qui traversait sa tempe, le bord de son oreille, la masse de ses cheveux pour aller mouiller le tissu de l'oreiller."

"Depuis qu'il (Claude) avait prononcé cette phrase si singulière à inventer, je suis orphelin, il avait oublié ses parents."

"T'aimer est aussi raisonnable que passionné." Estelle.

Les Autres - Alice Ferney - Actes-Sud - Août 2006 - ISBN 2-7427 - 6258-2

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