C’est
embêtant de rompre une règle, c’est ennuyeux de se contredire, de compliquer la
vie de ses lecteurs et des moteurs de recherche. Mais c’est bien ce que je vais
faire. « L’écriture ou la vie » ne rentre pas dans mes critères de
sélection pour ce blog, mais c’est un livre qui compte, vous allez voir.
Le résumé du livre
Le
récit commence le à Buchenwald, le12 avril 1945, le lendemain de la libération du
camp de concentration nazi pour des prisonniers politiques par l’armée du
Général Patton. Il s’achève en mars 1992 quand J. Semprun revient à Buchenwald
avec ses petits fils. Il lui a fallu près de 50 ans pur pouvoir témoigner de
l’horreur et du retour à la vie.
J. Semprun propose 3 parties : les quelques jours après la libération et le retour à Paris, les années qui suivent, le retour à Buchenwald. Il va raconter de courtes scènes, les entrelacer pour suivre les méandres de ses souvenirs, noter des perceptions, citer des poèmes, des musiques, évoquer des philosophes, des écrivains pour constituer une œuvre littéraire et reconstituer son vécu :
J. Semprun propose 3 parties : les quelques jours après la libération et le retour à Paris, les années qui suivent, le retour à Buchenwald. Il va raconter de courtes scènes, les entrelacer pour suivre les méandres de ses souvenirs, noter des perceptions, citer des poèmes, des musiques, évoquer des philosophes, des écrivains pour constituer une œuvre littéraire et reconstituer son vécu :
- L’arrivée au camp : en quelques minutes, l’humain, déjà épuisé par son transfert, est mis à nu, inscrit dans un commando qui le destine plus ou moins vite à la mort,
- Le chant du Kadish : au lendemain de la libération, J. Semprun et un copain cherchent des survivants dans les châlits d’un baraquement. Ils perçoivent un murmure.
- L’impossibilité de tuer un jeune allemand qui chante La Paloma d’une belle voix. Le fait de l’avoir tué quand il s’est arrêté de chanter.
- La mort de l’un de ses professeurs à la Sorbonne : Maurice Halbwachst est épuisé par la dysenterie. J. Semprun lui rappelle ses cours, lui récite doucement quelques vers du Voyage de Baudelaire.
- L’amitié nouée dans les latrines immondes du Petit Camp parce que l’on se découvre un goût commun pour la poésie et que l’on chante en allemand, le lied de la Lorelei.
- La libération du camp nazi de Buchenwald ne sera pas la fin du camp. Les communistes internés dans le camp penseront qu’il faudra rééduquer les anciens nazis. Les autorités soviétiques l’utiliseront jusqu’en 1950.
- Une visite de la petite maison de campagne de Goethe, aux abords de Weimar, au bord de l’Ilm, avec le Lieutenant Walter Rosenfeld, soldat américain et Juif berlinois
- La fumée, dense ou légère, dans le ciel, l’odeur de chair brûlée, l'ordre : « Krematorium ausmachen » , des airs de jazz, le chant des oiseaux et l’absence de chant d’oiseau, les bourrasques de neige
- Le retour à la vie : le bonheur de retrouver un corps apte à la vie, le bonheur de retrouver la présence des femmes, l’incognito du militant communiste, le succès littéraire,
- Le retour à Buchenwald. De nouveau, Weimar, la maison de campagne de Goethe, la colline de l’Ettersberg, la place d'appel du camp…
L’intérêt du livre
- Parler des camps de concentration a longtemps été difficile pour les personnes qui en sont revenues et met mal à l’aise celles qui savent un peu de quoi il s’agit. La création littéraire permet de surmonter ces difficultés. Le va et vient des souvenirs, les mouvements de l'inconscient et le partage des références culturelles captent l'attention,
- Evoquer l’horreur, mais aussi rappeler la fraternité possible, la beauté de quelques vers en allemand, en français ou en espagnol. J. Semprun transmet un humanisme et une culture irréductibles.
- Rappeler l'idéal communiste et ses dévoiements. Résistants en France, clandestins en Espagne, cadres communistes allemands de l'administration du camp et prisonniers politiques à Buchenwald, vieille garde à Bucarest, J. Semprun dresse quelques portraits.
Mais
on retiendra le message d’un écrivain espagnol de langue française, militant communiste déçu, européen pratiquant.
Citations
« Si
leurs yeux sont un miroir, enfin, alors je dois avoir un regard fou,
dévasté. »
« «S’en
aller par la cheminée, partir en fumée » étaient des locutions habituelles
dans le sabir de Buchenwald. »
« Fumées
pour un linceul aussi vaste que le ciel, dernière trace du passage, corps et âme,
des copains. »
L’auteur
Lycéen aux Pays Bas, puis à Henri IV à Paris, 2ème prix de philosophie au Concours général, il est étudiant à la Sorbonne en 1941. Il rejoint la Résistance et entre au Parti communiste espagnol en 1942. En septembre 1943, il est arrêté par la Gestapo et déporté à Buchenwald. Le camp est libéré par l’armée américaine du Général Patton le 11 avril 1945.
Retour à Paris. Il est traducteur à L'UNESCO, écrivain, scénariste. Il reste membre actif du PCE jusqu’en 1964. De 1988 à 1991, il sera Ministre de la Culture du gouvernement socialiste de Felipe Gonzales.
Il
meurt à Paris en 2011.
Ajoutés pour le plaisir :
Ce que j’ai lu :
·
Le
grand voyage
(1943) raconte le voyage en train des déportés vers Buchenwald,
·
L’homme
européen
(2005) écrit avec D. de Villepin exprime les convictions d’un homme qui se sait
européen,
·
Les références
L'écriture ou la vie - Auteur : Jorge Semprun - Editeur : Gallimard - Collection : Blanche - Date de parution : 04/10/1994 - ISBN 2-07-074049-8 -
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