dimanche 23 septembre 2012

Le livre de ma mère - Albert Cohen



Un nouveau livre sur le thème de la mère. Un fils raconte ses souvenirs, l’amour sans limite de sa mère et l’immense vide causé par sa disparition.

Le résumé du livre
Ecrire pour témoigner doucement du passé. Marseille, au début du XXème siècle, la famille juive sépharade a fui Corfou, Albert Cohen a 5 ans. Quelques scènes évoquent l’enfance : le tour de la Corniche en tramway le dimanche, la visite du médecin auprès de l’enfant malade, le commencement du sabbat, la mère a rangé l’appartement, préparé le diner, s’est apprêté et attend le retour du père et du fils, la solitude de la mère lorsque Albert Cohen part étudier à Genève en 1914. 


Il devient haut fonctionnaire. Quelques scènes se passent à Genève où la mère séjourne un mois, une fois par an : son arrivée en gare, la traversée d’une rue accrochée au bras paternel de son fils, ses 3 heures d’attente sur un banc, sa présence à la fenêtre, ses gestes familiers quand elle aperçoit son fils, le train du départ où le fils la voit si vieille. Ces gestes dont le fils ne peut que se souvenir puisque la mère n’est plus.

Ecrire pour exprimer et vivre encore des émotions violentes et lyriques : horreur de savoir sa mère enfermée dans son cercueil, honte d’avoir aimé passer quelques heures avec de jeunes femmes et négliger l’amour absolu de sa mère pendant ce temps là, chagrin d’être un homme vieillissant à qui sa mère ne répond plus. 
 
L’intérêt du livre
C’est bien sûr cette relation fils – mère. Elle est étrange cette relation. On aperçoit bien cette femme encore jeune et belle, étrangère dans cette Marseille du début du XXème siècle, isolée, sans lien avec sa communauté, ni d’autres personnes françaises, mais à l’aise sur le petit territoire de son appartement, seulement préoccupée du bien-être de son fils et de son mari. On voit le jeune garçon, parlant le français avec accent, injurié et meurtri à 10 ans parce qu’il est juif (ce qui n’est pas dit dans ce roman), à qui rien n’échappe, noter le malaise de la mère dans ses rapports sociaux, durant la promenade, pendant la visite du médecin et leur douce intimité.  

Ils sont tous les deux dans une bulle. La mère porte au fils une attention exclusive, sans limite et c’est là tout son bonheur ; le fils accepte ce dévouement avec lucidité et bonheur. Il ne construit pas d’autre relation plus intime. 

Dans le roman et dans son souvenir, aucune jeune femme ne saurait prendre une place aussi importante que celle de sa mère auprès de lui. 

C’est aussi l’éloge d’un acte magique : écrire. L’écriture du roman fait revivre la mère, permet de s’exprimer, donne une certaine joie de vivre. Alors Albert Cohen écrit ses souvenirs, ses sentiments et des variations comme des variations musicales : il rédige une prière, des litanies, des supplications. Il essaie des subterfuges : n’est-ce pas son visage dans la glace, ne frappe-t-elle pas à sa porte, ne la voit-il pas en rêve, est-ce qu’elle ne revit pas dans son texte ? L’écriture est-elle plus forte que la mort ?

Citations
« A la portière du wagon, elle me considérait si tendrement, avec folie et malheur, sans plus  se soucier d’être élégante et bien vêtue. »
« Edentés ou non, forts ou faibles, jeunes ou vieux, nos mères nous aiment. Et plus nous sommes faibles et plus elles nous aiment. Amour de nos mères, à nul autre pareil. »
« Je suis là trompant ma peine d’orphelin avec des signes à l’encre, attendant l’humidité noire où je serai le muet compagnon de certaines petites vies silencieuses qui avancent en ondulant. »

Pour le plaisir

L’auteur
Albert Cohen naît le 16 août 1895 à Corfou. En 1900, la famille émigre à Marseille. En 1914, il s’installe à Genève et s’inscrit à la Faculté de Droit. Il obtient sa licence en 1917 et suit alors les cours de la Faculté des Lettres. Il devient avocat en 1919 et commence à publier des textes. Il mènera une carrière de fonctionnaire international et d’écrivain. Sa mère meurt à Marseille le 10 janvier 1943. Il a 48 ans. Il écrit un premier texte à la mémoire de sa mère. Le livre de ma mère paraîtra en 1954. Il a 59 ans. Il meurt en 1981, à 86 ans.

Références
Le livre de ma mère - Albert Cohen - Editions Folio Plus Classiques 20ème siècle - novembre 2006 - ISBN 2-07-030725-5
Couverture : Mère et enfant - August Macke

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